Nous, passants indifférents - Jean-Yves Ducourneau
- Photo "Swan, homeless, on Mission St." de Franco Felini -
Nous sommes, plus qu'on pense,
ces passants indifférents.
Nous ne considérons pas du tout
les personnes en souffrance
comme des êtres humains,
ni même comme des animaux,
puisqu'il est vrai que notre regard trompé
se tourne plus facilement
vers un petit chien tout mignon
que vers quelqu'un qui sollicite justement,
et en premier lieu, notre regard.
Le pauvre,
assis près de son carton de misère
sur lequel est marquée sa faim,
nous fait peur
car il nous renvoie inconsciemment
à notre propre misère humaine
que nous rejetons d'un revers de la main.
Pire.
Il semble que nous ayons le sentiment
d'être agressés par sa main tendue,
par sa parole ou par son regard
qui peut paraître accusateur.
Donc,
nous le fuyons !
Nous fuyons notre frère en humanité,
notre frère d'âme,
au nom du principe de précaution
que nous mettons en oeuvre
comme un bouclier d'indifférence.
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